C’est peut-être le tien.

Julie Pouliquen
4 min readJun 1, 2020

--

Nous l’attendions tous, et nous étions plusieurs à le craindre. Avec la fin du confinement, la paix relative dont a profité la nature et ses habitants (humains compris) a pris fin. Ces images de pollution directement liée au Covid-19 choquent tout le monde, et l’on cherche des coupables. Elles ne sont pourtant qu’une illustration d’un problème majeur dont les exemples sont légion et les effets dûment documentés : le jetable.

Image France3

Mais qui sont ces gens ?

“Les gens sont d’un incivisme ! Je ne comprendrai vraiment jamais …”.

Les gens… Collectivement, nous ne tarissons pas de mépris sur ces pollueurs invisibles, citoyens irrespectueux jetant quotidiennement leurs poubelles dans la nature, leurs déchets en mer. Qui sont-ils ? Cette question nous tient éveillés, nous rend curieux. Qu’est-ce qui peut bien leur passer par la tête !?!

Ma réponse va peut-être vous choquer : c’est peut-être toi.

“Comment ? Mais quel irrespect ! Moi ! Viseur⋅se de poubelles devant l’éternel, il m’arrive fréquemment de ramasser des bouteilles plastique sur la plage ! Moi pollueur⋅se, jamais !”

Et pourtant… Pourtant nul ne peut garantir du “bon” traitement de son déchet. Qui n’a pas empilé un énième déchet sur une poubelle publique déjà pleine ? Ou posé à côté, en se disant que les éboueurs prendront le tout ? Et même sans ces facteurs potentiellement aggravants, même “bien” jeté, votre déchet aura peut-être croisé le chemin de deux ennemis de votre citoyenneté : les animaux, le vent.

Comble du comble. Les animaux, que l’on pense protéger en jetant dans la poubelle, sont les premiers à aller y récupérer ce que nous venions d’y déposer. Rongeurs, chats, chiens, oiseaux en font l’une de leur activité favorite, ces boulets ! Quant au vent, comble toujours, il donne le plus de voix aux endroits où ses effets sont les plus dévastateurs… le long des rivières, et en bord de mer. Oh, ce n’est pas mieux dans les terres, car la mer est partout ! Elle commence toujours ici, à tes pieds, sous cette plaque d’égout ou dans ce ruisseau.

Alors oui, les c**s existent, bien sûr. Mais pense que l’incivisme serait moins dérangeant si le plastique n’avait pas envahi nos vies. Et pense que dans cette guerre contre la pollution, personne n’est vraiment totalement innocent.

C’est pas cool mais c’est mieux

Certes, il n’est pas très agréable de s’entendre dire que l’on est un pollueur (potentiel). Mais il y a un côté réjouissant à cela : tu te pensais victime (de l’incivisme ambiant), te voici acteur⋅ice ! Peut-être un peu moins confortable, mais tout de même plus satisfaisant, tu ne trouves pas ? Perso, je préfère.

Alors, loin de culpabiliser, capabilisons ! Grandissons ! Arrêtons, auto-infantilisés, de blâmer “les gens”, et d’attendre d’autrui (État ? Associations ? Entreprises du secteur ?) une solution à cette plaie qu’est la pollution de notre planète.

Les déchets, tant qu’ils existent, continueront d’envahir la nature. Le 100% “bien jeté”, 100% recyclé est absolument inaccessible. Il existe trop de possibilités de pertes et de ruptures dans cette chaîne de “valorisation”. Et quelle valorisation… car si votre déchet atterrit bien où il est censé atterrir, il sera au pire enfoui, au mieux brûlé (les masques chirurgicaux ne sont pas recyclables).

Reprendre le contrôle

Le plastique nous materne, nous maintenant dans un état de dépendance enfantine à la praticité d’un usage pourtant destructeur. Que surtout, le c̶i̶t̶o̶y̶e̶n consommateur n’ait pas à trop réfléchir pour acheter. Il n’avait pas prévu de faire des courses ? On lui fournit boîtes et sacs en plastique. Pas prévu de manger à emporter ? On lui donnera couverts, assiettes, verres jetables. Lui éviter de penser, d’anticiper, de conscientiser l’acte d’acheter.

Dire non au jetable (il peut s’agir de l’objet ou juste de son emballage), c’est reprendre le contrôle sur sa consommation, n’acheter que ce que l’on a prévu d’acheter. Quand l’achat est prévu et conscient, prendre le contenant adéquat pour aller le réaliser est juste une évidence.

Éviter l’imprévu, c’est donc prendre naturellement ses distances avec la publicité et le marketing : les effets tête de gondole, les promotions, la fast-fashion. Non, ce n’est pas l’ “opportunité” promotionnelle qui contrôlera mon portefeuille et mes placards, mais bien mes décisions, mes besoins et mes envies réfléchies.

Libres de consommer ?

On nous vend la “liberté de consommer ce que l’on veut, quand on veut”. Liberté ? Cela n’a rien d’une liberté. C’est une dépendance, dont on peut mettre du temps à se défaire. D’ailleurs, s’en défait-on vraiment ? Les marques sont à la pointe des recherches comportementale, psychologique et sociale, et s’occupent de générer en toi l’envie d’acheter, sans même que tu en aies conscience.

Alors oui, il faut “se laisser vivre”, apprécier l’idée impromptue de ce chapeau de paille, made in France, qui s’accorde si parfaitement avec le petit short que vous portez fréquemment… il ne s’agit pas d’être dans l’interdit ! La frustration n’a jamais été la bonne compagne d’un changement d’habitudes… Pour nos coups de cœur, peut-être pourrions-nous simplement toujours disposer d’un ou deux sacs, d’un jeu de couverts, d’une gourde et d’un verre dans son sac à dos (ou à main), pour parer aux éventualités ?

Bonus : la plupart du temps, tu auras droit à la fameuse phrase “Ah, si tout le monde faisait comme vous…”. Toujours bon à prendre, non ?

--

--

Julie Pouliquen
Julie Pouliquen

Written by Julie Pouliquen

Travaille à son émancipation personnelle, tente de contribuer à l’émancipation de chacun⋅e. #ethique #zerodechet #minimalisme #CIGALES Steven #work @La_Cordee

No responses yet