Et si tu échangeais ta maison ?

Julie Pouliquen
7 min readJul 29, 2020

L’année dernière, nous discutons vacances vers la fin du printemps avec des amis. Ils nous disent qu’ils se sont inscrits depuis quelques mois sur un site, HomeExchange, et que pour leur dernier séjour, à Hambourg, ils ont fait de l’échange d’appartement. Leur discours fait tilt : le lendemain, nous voici parrainés, notre compte est créé et notre appartement en ligne !

3500 résultats, pour une recherche “Bretagne” : de quoi trouver notre bonheur !

De Airbnb à HomeExchange

L’époque Airbnb

Pendant plusieurs années, j’ai mis mon appartement sur Airbnb. Couchsurfeuse aguerrie en léger manque de thunes (création d’entreprise oblige), l’idée me plaisait bien. Au début de cette histoire, le concept était séduisant. Il y avait peu d’appartements disponibles sur Airbnb à Lyon, et je n’avais aucun souci à louer le mien, dans le Vieux Lyon, à un prix tout à fait raisonnable. Ça valait le coût, à savoir le temps, la charge mentale et l’énergie consacrés à cette activité (plus d’une demi-journée de rangement et nettoyage à chaque fois)… C’était un petit truc d’early-adopters, et ça mettait du beurre dans les épinards.

Je laissais mon appartement en location à chaque fois que je partais en vacances ou en week-end. Avec un salaire d’entrepreneure, ça me payait mes séjours, et parfois même un peu plus. Clairement, je suis plus facilement partie grâce à Airbnb que je ne l’aurais fait sinon.

Le début de la fin

Quand on a commencé à vivre à deux, j’ai voulu continuer de temps à autre. Pour mon conjoint, le gain était moins évident. Charge mentale et travail à fournir important pour, il est vrai, un retour financier de plus en plus faible, et un retour humain de plus en plus… clientéliste. D’hôtes, nous étions devenus prestataires hôteliers. Nous avons continué à quelques occasions qui se sont faites de plus en plus rares (séjours longs… et week-end des Lumières, of course).

Le clap final

La der des ders, c’était le week-end des Lumières 2017. Nous avons laissé notre appartement sur Airbnb et sommes partis à Lisbonne. Là, j’ai été frappée : par les quartiers vidés de leurs habitants, les Masterlock à toutes les fenêtres, par cette ville qui étouffait sous le joug de cette plateforme. Nous avions bien essayé de trouver pour Lisbonne un appartement vraiment habité, mais quand nous sommes arrivés et avons vu ce parfait écrin vide de vie, cette cuisine dans laquelle il n’y avait pas de sel… j’ai compris.

Je me suis rappelé tous les articles déjà lus sur les ravages d’Airbnb sur les centre-villes, la pression sur les loyers… Je m’était toujours sentie détachée de ces problèmes, car moi, je louais bien mon propre logement (certes, dont j’étais locataire…). Je n’avais pas dévoyé l’usage, je n’avais pas dévié du deal de départ, je n‘avais pas contribué à vider notre centre-ville ! Peut-être, mais la pomme était vérolée et ne me faisait plus du tout envie.

Errements vacanciers

Pendant les quelques années qui ont suivi, nous avons un peu erré au niveau de nos vacances. En road-trip dans le nord de l’Espagne, nous avons testé un concept très chouette mais sur lequel nous n’organiserions pas des vacances entières : Gamping (le camping chez l’habitant). Nous avons pris quelques nuits d’hôtel aussi. Logé chez des amis.

Loger chez l’habitant a pour nous un goût particulier. Nous sommes des touristes qui se veulent des “locaux temporaires” : on veut se fondre dans un quartier, y trouver les bonnes adresses, en devenir des habitués. Au début de nos séjours, lorsque l’on trouve l’épicerie, la seule, la vraie, l’unique, avec du bon, bio, local, du vrac même peut-être, bref the (prononcez “zi”) épicerie, et que la vendeuse nous demande si nous avons la carte de fidélité, on la refuse mais la question se pose : clairement, nous y viendrons tous les 2 jours pendant 2 à 3 semaines !

Bref, l’échange de maisons

Vous l’aurez compris, nous étions théoriquement mûrs pour l’échange de maisons. Seulement dans ma tête, c’était un truc un peu à l’ancienne, fait par des familles avec des grosses maisons. Les seules personnes dont j’avais entendu parler qui faisaient de l’échange de maisons étaient des amis de mes parents, au train de vie plutôt aisé, qui échangeaient leur maison du pays Basque contre un appartement de 120 m² à San Francisco.

Du coup quand Cécile et Rémi (et Marcel, leur bébé un peu plus grand qu’Alice) m’en ont parlé, eux qui avaient un appartement à Lyon tout comme nous, ça a fait tilt direct. L’année dernière, ils nous parrainaient, nous créions donc notre profil fin juin, et partions début août 3 semaines à Barcelone.

À ce jour, nous avons accueilli quatre fois du monde, et sommes partis deux fois. Aujourd’hui, nous sommes dans notre premier échange réciproque et simultané, à Saint-Malo !

Comment ça marche ?

Il y a trois façons d’échanger :

  • L’échange réciproque simultané : l’un chez l’autre, au même moment.
  • L’échange réciproque non simultané : l’un chez l’autre, à des moments différents.
  • L’échange contre des points (GP = Guest Points)

Bien sûr, il s’agit de remplir un profil, de renseigner complètement sa maison, de mettre des photos, de tout expliquer… En fonction de ses caractéristiques, HomeExchange évaluera le “prix” de votre maison en points. La nôtre vaut 115 GP. À savoir que j’ai rarement vu moins que 70 GP, et plus que 250 GP par nuit. Il est donc aussi envisageable d’accumuler des points, en vue d’un jour se faire un séjour exceptionnel dans une luxueuse villa vue mer.

Les messages s’échangent librement entre les membres. Il ne faut pas hésiter à envoyer beaucoup de messages pour avoir des réponses positives, car bien entendu il n’y a aucune obligation d’accepter quoi que ce soit. Votre demande d’échange doit donc parfaitement arranger les personnes qui vous accueilleraient et leur donner confiance… ce n’est pas forcément évident. En moyenne, pour obtenir les deux réponses positives qui nous ont amenés l’année dernière à Barcelone, cette année à Saint-Malo, nous avons envoyé autour d’une trentaine de messages à chaque fois.

Je ne vous détaillerai pas toutes les fonctionnalités, mais sachez que la plateforme est plutôt bien pensée. Vous pouvez par exemple faire de la recherche inversée, du type “j’aimerais aller en Bretagne, qui sont les HomeExchangers qui ont une maison en Bretagne et aimeraient venir à Lyon ?”, ce qui est bien pratique.

Questions pratiques

La plateforme s’occupe des questions d’assurance. Le seul coût de l’échange de maison est un prix payé à la plateforme, de 130€ l’année (quel que soit le nombre d’échanges). De ce que j’ai pu constater lors de nombreux témoignages, le service assuré par HomeExchange en cas de souci lors de son voyage est de très bonne qualité.

Aussi, puisqu’il ne s’agit pas d’une sous-location, qu’il n’y a pas d’échange d’argent, il est tout à fait possible de faire de l’échange de maison sans avoir à en informer son⋅sa propriétaire. Légalité, et tranquillité d’esprit.

Une autre façon d’appréhender le voyage

De l’humanité et de la localité

Les relations sur HomeExchange, exemptes des questions financières, sont beaucoup plus proches de ce que nous cherchons dans nos voyages. Récemment, quelqu’un me disait que c’était un peu comme accueillir chez soi (ou être accueilli par) des amis d’amis. On ne les connaît pas, mais la confiance est de mise et l’envie de faire plaisir bien présente. Au final, nous passons autant de temps qu’avec Airbnb à préparer l’appartement, mais le sentiment est différent, mêlé d’enthousiasme et toujours d’une petite appréhension “J’espère que ça va leur plaire !”.

Pour qui veut (comme nous) être un “local temporaire”, il n’y a pas mieux : le partage de bonnes adresses est tout naturel, de même que le petit texto “Vous auriez une bonne crèmerie à nous conseiller ?” (à noter que vous pouvez également poser ces questions dans la rue à toute personne n‘ayant pas un appareil photo autour du cou, ça a des chances de marcher !). Aussi, leur garage est temporairement le vôtre, avec ses vélos… ou ses bodyboards !

Se laisser porter ?

Il y a clairement deux façons d’apprécier l’échange de maisons : soit vous avez un ou plusieurs destinations en tête, et vous cherchez jusqu’à ce que vous trouviez (ça a été notre cas jusque là), soit vous vous laissez porter par les demandes qui ne manquent pas de vous parvenir.

En une année, nous avons eu des propositions d’échanges pour : la Réunion, les États-Unis (plusieurs fois), le Canada, l’Australie et Dubaï pour les plus lointains, nous en recevons assez fréquemment pour l’Espagne, le Portugal et l’Italie, quelques fois pour d’autres régions de France que pour le moment nous n’avions pas prévu de visiter… mais sait-on jamais ? Peut-être qu’à l’avenir, clairement convaincus par cette nouvelle façon de voyager, nous nous laisserons porter par les propositions ? Au final, nous ne sommes pas si compliqués : un accès train, des vélos, un bourg avec des commerces à proximité… bonus pour la plage, et le barbecue sur la terrasse !

S’il s’avère que je viens de décrire ta maison, utilise ce lien pour créer ton profil (marrainage : jusque 250 GP pour toi et moi), et celui-ci pour nous faire une demande. Deal ?

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Julie Pouliquen

Travaille à son émancipation personnelle, tente de contribuer à l’émancipation de chacun⋅e. #ethique #zerodechet #minimalisme #CIGALES Steven #work @La_Cordee