Oui à la bonne charge mentale ?
Depuis quand en est-on arrivés là ? On sort tous les matins chercher du pain sans penser qu’un sac pour le ramener ce serait une bonne idée. On prend ses clefs de voiture pour sortir de sa maison, quelle que soit la direction. On ne se renseigne pas sur la direction d’ailleurs, le GPS s’en chargera bien. On part faire ses courses sans se demander de quoi on a besoin, on arrive dans le supermarché les mains dans les poches. En fait, de manière plus générale, on vit les mains dans les poches. Libres de tout, en maîtrise de rien. Ouverts à l’opportunité, et victimes des opportunistes. On vit la vie des autres.
Ôde (?) à la flemme
L’humain a toujours été flemmard, à son corps défendant. C’est probablement sa plus grande tare tout autant que sa plus grande qualité : il cherche en permanence à réduire l’énergie que lui prend chaque tâche (ce qui fut le meilleur moteur du progrès).
Mais jamais dans l’histoire le “développement”, le “progrès” ne lui avait permis de l’être autant. Aujourd’hui, nous vivons dans une période “bénie” où vous pourriez tout faire de votre lit : travailler, vous nourrir, rester en contact avec le monde. Quand nous avons un effort à faire, une “course”, il est réduit au maximum : éventuellement y aller (c’est de moins en moins le cas), sans effort si possible (de parking à parking c’est mieux), clairement sans anticiper les contenants / récipients pour ladite course. C’est ça le confort.
Vous me répondrez peut-être qu’ainsi libéré des basses préoccupations techniques qu’impose le fait de posséder… un corps (sic), l’homme est plus en capacité d’utiliser son intellect, d’où un report des métiers vers le sectaire du tertiaire. Mais ce n’est même plus vrai : même le tertiaire n’a plus tant besoin d’humains.
Et le pire dans tout ça ? C’est que c’est tellement intégré qu’à tous les maillons de la chaîne on se dit que c’est normal. Il ne viendrait pas à l’idée du boulanger d’exiger que ses clients ramènent un sac, ou même tout simplement de les y inciter ! Il ne faudrait pas les déranger les petits choux… L’idée même de se dire qu’il faudrait mieux anticiper paraît démente. Anticiper ?
On a voulu le soulager, on l’a détruit
Tous les maux se développent, physiques et mentaux… pour ne parler que des maux humains. Parce que les autres espèces, et la planète, douillent grave. Du coup, on a atteint un niveau de confort incroyable, mais en fait rien ne va. On a perdu en condition physique, en capacité d’attention, en mémoire.
Charge mentale
Et pourtant nous sommes la première génération à parler de charge mentale. Le chasseur-cueilleur aurait-il parlé de charge mentale ? Pourtant, lui, soit il trouvait de la nourriture, soit toute sa famille mourrait !
Et pourtant, elle est bien là la charge mentale, les témoignages sont légion. C’est d’ailleurs un sujet d’importance parmi les écologistes par ailleurs, et pour deux raisons principales :
- Vivre une vie plus en accord avec des principes écologiques représente(rait) une surcharge mentale (penser aux emballages, aux tupperwares, repenser sa consommation, ses transports… bref : anticiper, optimiser).
- La “charge mentale de l’écologie” est (comme de par hasard), elle aussi genrée.
La bonne, et la mauvaise charge mentale
Et pourtant, voici ce que je ressens. La charge mentale, le mal-être de notre génération, la quête de sens… ne seront jamais résolus par une énième appli pour vous soulager le cerveau (et pouvoir vous consacrer à votre yoga). Réduire ta charge mentale, c’est exactement ce que la société de consommation te promet depuis 50 ans. On fait à manger pour toi, on se déplace à ta place, Google pallie tes trous de mémoire, ton GPS te dit où aller, ton appli de musique te dit quoi écouter et tes réseaux sociaux te disent quoi lire. Et tu dis que tu manques de temps ?
Aujourd’hui tout est facile, mais en fait on ne contrôle plus rien. On ne sait plus pourquoi on achète ce qu’on achète, pourquoi on travaille là où on travaille, pourquoi on se déplace de cette manière-là. On met des mots dans notre bouche, des vêtements sur nos corps, des pédales de SUV sous nos pieds. Bientôt, on remplira notre frigo pour nous. Vrais-faux coupables d’une consommation non maîtrisée, nous nous en défendons et nous faisons les porte-voix des plus sales lobbies, qui s’en frottent les mains. On est bourrés de dissonances cognitives, de contradictions cachées sous le tapis.
Tout est fait pour aller dans le sens de cette déconnexion. Nos attitudes, nos choix, nos comportements… les plus grands spécialistes de nos fonctionnements cognitifs sont les marques qui les détournent à leur profit. On vit la vie des autres, pas la sienne. On n’utilise plus notre cerveau, plus nos jambes, plus notre libre-arbitre. Et on le sait, plus ou moins consciemment. C’est l’angoisse.
Reprendre la maîtrise
En fait le but, ce n’est pas de réduire la charge mentale, mais bien de se l’approprier. De s’en sentir maîtres. Comprendre, s’approprier, gagner en autonomie : oui c’est de l’énergie, du temps, de la charge… mais de la bonne ! Un peu comme les cholestérols, le gras, les sucres : il y a les bons, et les mauvais. Ceux qui huilent ton cerveau et ceux qui l’empâtent.
Alors huilons nos cerveaux, ils en ont besoin ! La transition passera par là. Mais prenons soin de nous au passage. Ne remplaçons pas la charge mentale par la culpabilité, ce serait trop bête. Oui, le changement c’est compliqué. C’est un long chemin fait d’embûches, d’obstacles et de nids de poule… sur lequel, fort heureusement, les bonnes rencontres sont légion et le soleil brille fort entre deux orages. Une chose est certaine, c’est un chemin que l’on n’emprunte que dans un sens : on peut se perdre, on peut revenir ponctuellement sur nos pas, mais on est toujours plus heureux⋅se et fier⋅ère de l’emprunter plutôt que de le bouder.
Et s’il y a bien une chose qui peut aider dans ce processus, c’est de bien se faire entourer, et d’accepter de demander de l’aide.
Pistes pour avancer
Les réseaux d’entraide
Il en existe des dizaines, notamment surtout sur Facebook (eh oui, c’était la dernière chose qui m’y raccrochait) : à Lyon évidemment le groupe Entraide Apprentis Zéro Déchet, mais aussi le groupe Famille Zéro Déchet, les groupes Wanted, le groupe Gestion budgétaire, entraide et minimalisme… Vous y trouverez de l’aide tout autant qu’une communauté de valeur.
Les associations
À Lyon, Anciela est incontournable, et ici ce seront les démarches Envie d’Agir, et surtout les Ambassadeurs du changement qui nous intéresseront. L’association Zéro Déchet Lyon également pourra vous être d’une grande aide. Il y a sûrement autour de chez vous des associations ou tiers-lieux qui ont pour but de favoriser la transition des personnes et des organisations et dont vous pourriez vous rapprocher.
Et pourquoi pas : un truc un peu nouveau !
Le Guichet, c’est la dernière démarche dont je suis à l’origine. L’idée est d’aider à la prise de décision en matière de changement de mode de vie et de modes de consommation, au travers d’un guichet en ligne totalement ouvert et anonyme, où exposer ses besoins pour y trouver la réponse la plus appropriée. Ce ne serait pas le moment de venir y écrire un billet ?
Votre charge mentale vous dira merci 😉